Rosalie Bès
Sœur Sainte-Pélagie.
Religieuse sacramentine de Bollène.
Rosalie Clotilde Bès était fille d'un fermier général de la
Seigneurie de Baume-de-Transit (Drôme). Elle naquit dans cette localité le 30
juin 1752 de Pierre Bès et de Jeanne-Marie Maurin, et fut présentée au saint
baptême le même jour. Sa marraine fut la servante de la maison, Antoinette
Guyon.
À l'âge de 20 ans, elle quitta le monde et se présenta au
couvent du Saint-Sacrement de Bollène, où elle fut admise en qualité de
postulante le 4 mars 1772 ; le 1er juin suivant, elle prenait
l'habit, et un an après, le 3 juin 1773, elle prononçait ses vœux. Son nom de
religion était Sœur Sainte-Pélagie de Saint Jean-Baptiste.
Il ne nous est parvenu aucun témoignage contemporain sur la
vie de Sœur Sainte-Pélagie avant son arrestation. Mais nous savons que dans la
prison d'Orange, où elle avait été conduite le 2 mai 1794, elle édifiait ses
compagnes par sa régularité, son désir du martyre et une sainte joie de souffrir
pour Jésus-Christ. Ces sentiments si admirables de générosité étaient, à n'en
pas douter, le fruit et la récompense de vingt ans de vie religieuse. La
professe avait préparé la martyre. Aussi, quand le 10 juillet, elle entendit
proclamer son nom, dans l'appel fatal, elle était prête au sacrifice. Elle
comparut devant la Commission populaire avec Élisabeth Pélissier (Sœur
Saint-Théotiste) et Claire Blanc (Sœur Saint-Martin), sacramentines comme
elles ; Marguerite d'Albarède (Sœur Sainte-Sophie), ursuline, leur fut adjointe.
L'acte d'accusation les chargea d'un même crime : fanatisme,
refus de serment. Le rapport adressé par la Commission au Comité de Salut Public
ajoute que les quatre religieuses ont répondu à l'observation que la loi avait
aboli toutes les corporations, « qu'elles étaient nonobstant religieuses ; que
le serment était contraire à leur conscience..., etc. »
La Relation des Sacramentines de Bollène dit : « La
sœur Pélagie ayant entendu sa condamnation à mort parut transportée par l'espoir
de voir finir la vie misérable de ce bas-monde et commencer bientôt celle de la
céleste immortalité. Le jugement était à peine prononcé que se tournant vers ses
compagnes condamnées avec elle et pour la même cause, elle leur dit avec un
saint enthousiasme : “C'est donc aujourd'hui que le a céleste époux va nous
admettre aux noces, pour lesquelles nous n'avons fait jusqu'à présent que de
bien légers sacrifices“. Embrassant ensuite ses sœurs, elle tira de sa poche une
boîte de dragées, elle la leur présenta en disant : “Ce sont les dragées de nos
noces“. Et chacune en mangea, dans une sainte joie.
Montrant ensuite l'anneau qu'elle avait au doigt et qu'elle
avait reçu au jour de sa profession : “Voilà, dit-elle, le gage de la promesse
qui nous fut faite et qui va être remplie en ce moment. Allons, mes sœurs,
allons ensemble au même autel, que notre sang, en lavant nos infidélités et en
se mêlant au sang de la victime sainte, nous ouvre bientôt les tabernacles
éternels“ ».
Les tabernacles éternels s'ouvrirent, en effet, pour Sœur
Sainte-Pélagie et ses trois compagnes le même jour, à 6 heures du soir. Elle
avait 41 ans.
Abbé Méritan

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