Madeleine de Guilhermier
Sœur Sainte-Mélanie.
Religieuse ursuline de Bollène.
Marie-Anne Madeleine de Guilhermier était née à Bollène le 29
juin 1733. Son père, Jean Julien de Guilhermier et sa mère, Marie-Louise Icard
la présentèrent au saint baptême dès le lendemain. Son enfance s'écoula paisible
et pieuse, et il n'eût tenu qu'à elle d'occuper dans le monde la place que la
noblesse de sa famille et sa situation semblaient lui réserver.
Mais à peine sortie de l'adolescence, et l'âme pleine des
tendres et fortes leçons maternelles, Madeleine résolut de se consacrer à Dieu.
Elle se présenta au couvent de Sainte-Ursule de Bollène, y fut admise sous le
nom de Sœur Sainte-Mélanie, et fit profession le 22 juin 1750. Elle avait à
peine dix-sept ans. La Providence qui lui réservait la couronne des martyrs lui
ménagea une longue préparation à son sublime sacrifice. Pendant quarante ans,
elle vécut dans son monastère, un des plus réguliers et des plus fervents, de
l'obscure et édifiante vie de la religieuse, occupée à l'observation de sa
règle, à la sanctification de son âme, et ne sachant rien du monde, malgré la
proximité de sa famille et de sa parenté, que ce que lui en apportaient les
rares et faibles échos qui franchissaient les murs de son monastère.
Forcée de sortir de son couvent, en cette malheureuse année
1792, elle voulut continuer à vivre en communauté, partageant avec ses
compagnes, les privations de tous les jours, les secours passagers qu'elle reçut
de sa famille, mettant libéralement au service de ses sœurs les aumônes qu'elle
recevait, et jusqu'au pauvre mobilier qu'elle avait pu emporter du couvent.
Cette vie toute de piété, et de saintes observances, ne fut
même pas interrompue par son arrestation. C'est en effet avec vingt-huit
religieuses de Bollène qu'elle fut emprisonnée à Orange, le 2 mai 1794, et c'est
avec elles que s'écoulèrent ses derniers jours. Nous avons dit plus haut comment
ces saintes filles avaient fait de leur prison un monastère. Madeleine ne fut
pas la dernière à embrasser la règle volontaire qu'elles s'étaient imposé. Son
âge relativement avancé, – elle avait alors 61 ans – son long séjour au couvent,
lui donnaient sur ses compagnes une autorité que toutes furent heureuses de
reconnaître. Elle ne s'en prévalut, elle-même, jamais autrement que pour se
faire le conseil et le modèle de ses sœurs, pour relever leur courage, et les
exhorter à se préparer à la mort.
Le 9 juillet, elle était appelée au tribunal. Pour elle,
comme en général pour tous les accusés, et surtout pour les prêtres et les
religieuses, l'accusation de fanatisme, de superstition fut la principale, celle
que l'accusateur public prit soin de développer et de faire ressortir. Comme on
avait trouvé sur elle, lors de son arrestation, quelques images de piété, et une
feuille d'exhortations édifiantes, comme, au surplus, elle avait refusé le
serment qu'elle considérait comme une apostasie, son fanatisme ne faisait aucun
doute. Sa qualité d'ex-noble, d'ex-religieuse était, de son côté, un crime
capital.
Elle fut donc condamnée à mort, et exécutée le même jour,
mercredi, 9 juillet. Elle entendit avec joie sa sentence et marcha avec
intrépidité au supplice. Avec elle furent immolés le père Jean Mathieu Fiteau,
jésuite, et une jeune religieuse, Sœur Marie-des-Anges (Marie-Anne de Rocher),
ursuline comme elle, et du même couvent.
Sœur Sainte-Mélanie avait 61 ans. Elle avait passé
quarante-quatre ans dans la vie religieuse.
Abbé Méritan

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